Triste nouvelle: Jacques Chirac est décédé
L’homme qui s’est battu pendant plus de trente années pour devenir Président de la République Française est décédé aujourd’hui.
Ses communicants se plaisaient à présenter Jacques Chirac comme quelqu’un d’impétueux et audacieux qui, dans sa jeunesse, avait quitté la France pour les États-Unis. Cette image, en fin de compte, n’ était pas qu’une image d’ Epinal: elle correspondait à une réalité certaine de l’ homme. Il y eut beaucoup de mesures, de prises de paroles tout au long du chemin qui le conduisit du Ministère de l’Agriculture à la Présidence de la République,en passant, entre autres, par la charge de Premier Ministre.
Il était connu par ses services de protection rapprochée pour effectuer des changements de parcours ou de programme des plus surprenants, voire audacieux. Lors d’un déplacement dans la vieille ville de Jérusalem, en 1996, les maladroites pressions du service d’ordre israélien le conduisirent à faire connaître sans détour son point de vue en déclarant » Qu’est-ce que vous voulez? Que je reprenne mon avion? ». Sans omettre d’ évoquer l’opposition qui fut la sienne, au nom de la France, à la guerre d’Irak … bien que celle-ci ait fini par être déclenchée sur des prétendues informations américaines affirmant l’existence d’armes nucléaires irakiennes, et qui s’avérèrent pas la suite n’ être qu’un prétexte fallacieux.
Du quinquennat en passant par la suppression du service militaire, l’ arrêt des essais nucléaires, ou la bataille pour l’agriculture et les industries françaises, jusqu’à la loi sur le handicap, tout le spectre de la nation a fait l’objet de ses déclarations et de ses décisions.
Il était passionné de sumo, de voyages, de culture. Son intérêt pour les civilisations d’Afrique, du Pacifique, d’Asie, d’Océanie et des Amériques se concrétisa par la création du Musée du Quai Branly. Il avait des jardins secrets, se jouait des formules du discours, mais savait surtout « faire feu » de mots parfois audacieux. Ce furent les formules mémorables « Elles vont faire pschitt » en réponse à une question sur ses voyages privés entre 1992 et 1995 lors de l’interview du 14 juillet de 2001, ou «une histoire abracadabrantesque » en 2000 à propos des affirmations de Jean Claude Mery sur le financement du RPR.
Et, effectivement, ses campagnes pour la Mairie de Paris furent abracadabrantesques. Pour conquérir Paris qui avait changé de statut juridique pour être dirigé par un Maire, Jacques Chirac battit, pour son premier mandat, le candidat de Valéry Giscard d’Estaing, Michel d’ Ornano. Tout comme le fut le scrutin de 1989 pour obtenir le grand chelem. Mais cela permit aussi à Jacques Chirac de représenter une nouvelle politique dans la gestion de la ville, puis de s’appuyer sur la structure de celle-ci pour renforcer sa position politique, et gagner les présidentielles de 1995.
Napoléon appréciait les généraux qui avaient de la chance. On ne sait si ce sont les qualités manoeuvrières de Jacques Chirac ou sa chance qui lui permirent de gagner les élections de 1995. Mais ses bureaux de campagne désertés alors que le Tout-Paris était persuadé de sa chute furent un souvenir fort. Et on ne sait encore aujourd’hui si c’est en priorité son thème de campagne sur la fracture sociale qui lui permit de gagner. Mais le fait est que Jacques Chirac finit par gagner contre toutes les adversités.
Toutefois le fait le plus marquant de cette longue carrière politique reste son attention aux Français. Ce fut peut-être son parcours qui le rendit particulièrement conscient des lourdeurs de l’État et de ses administrations. Lors de ses mandats à la Présidence de la République, il fut en tout cas attentif aux requêtes des Français, à leur volonté d’aller de l’avant, et les appuya sans limites partisanes.
De fait c’est dans son dernier discours à l’ Elysée, lors de son deuxième mandat, en mars 2007, que Jacques Chirac résuma son parcours et sa philosophie de l’action par cette phrase: « Servir la France c’est l’engagement de toute ma vie ».
Jean Cousin
Commentaires récents